Pâturage (4/4) : bilan après 3 années de pratique

 Je me me permets de faire un bilan de mon approche du pâturage tournant dynamique après trois années de mise en place. Mes pratiques passées du pâturage, qui entrainaient un surpâturage chronique et une compaction des sols, me laissaient perplexe quant à la productivité de mes prairies. En me lançant dans la mise en place d'un pâturage rationnel, j'avais le vif espoir que cela fonctionne, mais très peu de certitudes. Cette sensation était appuyée par le fait que personne, dans mon environnement proche, n'employait cette méthode. 

L'adaptation comme maitre mot

Je dois avouer que j'ai été agréablement surpris dès la première année par la productivité correcte de mes prairies. De plus, la gestion quotidienne de ce pâturage se révéla intéressant et stimulant. L'adaptation constante à la vitesse de pousse et à la météo nous entraine à choisir la bonne vitesse de rotation, à, éventuellement, débrayer des parcelles. Alors oui, on met du temps à choisir au début, on a du mal à se faire confiance. On remet même parfois la méthode en question, parce qu'elle bouleverse nos habitudes, et on n'aime pas ça ! Donc oui, on se plante parfois, mais cela restera toujours le meilleur des apprentissages. Le livre Le pâturage tournant dynamique nous donne toute la méthode et les pistes de réflexion. D'ailleurs, je relis des passages régulièrement au gré de mes questionnements du moment.

Mes vaches rentrant au bâtiment

Calibrer notre mesure de l'herbe

Je pense que le plus compliqué au départ est de se faire confiance. C'est-à-dire que, tour après tour, parcelle après parcelle, nous devons toujours adopter le même jugement sur le stade de l'herbe. Me concernant, je prends toujours du raygrass anglais pour pouvoir mesurer mon stade d'herbe, je n'hésite pas pas à prendre 2 ou 3 plantes si je veux être sûr de mon jugement. Néanmoins, cette opération s'est révélée complexe dans quelques parcelles, fortement endommagé par des surpâturages passés, dont la population de raygrass anglais était quasi inexistante. L'agrostide stolonifère avait, en revanche, pu exprimer tout son potentiel de colonisation dans ces espaces dégradés. Après trois, dans ces mêmes parcelles et en adoptant des pratiques positives pour mon sol, je vois réapparaitre par endroit du raygrass anglais accompagné de trèfle blanc ! Il va me falloir encore de nombreuses années avant d'obtenir une excellente fertilité, mais c'est très encourageant de voir que les efforts et les actions sont récompensés.

La gestion du stress de pousse

Entre le mois de mai et juin, l'herbe essayera d'épier dès qu'elle se sentira menacer. C'est à dire que lorsque la plante dispose d'eau dans une période où les températures sont douces, elle continuera son cycle végétatif. En revanche, dès qu'un stress arrivera, comme un manque d'eau et surtout une forte hausse des températures, la plante passera en mode survie en lançant sa phase reproductive. C'est injuste mais sachez que plus un sol est dégradé, plus les moments de stress sont fréquents et fulgurants. Pour un débutant en pâturage tournant dynamique sur des prairies fatiguées, on est sûr de commettre des erreurs de jugement ! Pour y palier - un peu -, je n'hésite pas à faire 2 tours des champs par semaine quand je constate que les risques d'épiaison sont très forts. Il est aussi bon de rappeler qu'il faut pâturer au stade 2,5 feuilles et donc ne pas attendre le stade 3 feuilles au printemps.

Les prétendues mauvaises herbes

Parcellaire du pâturage de mes vaches laitières
Enfin le bouquet final, ça été une explosion la première année entre les chardons et les rumex. La stratégie employée a été celle du procrastinateur, ne rien faire ! C'est facile à dire mais n'accordez pas d'importance aux réflexions que vous entendrez. Chez moi elles ont été nombreuses ! Après trois années, j'estime leur population décroissante, mais toujours présente. Il est amusant de constater que leur présence décroit proportionnellement à notre éloignement du bâtiment des vaches. Je m'explique, avant la mise en place du pâturage rationnel, nos vaches sortaient au "surpâturage" dans les paddocks allant du numéro 1 au numéro 16. Aujourd'hui, les chardons et rumex explosent dans ces parcelles. A contrario, ces plantes se retrouvent en tout petit nombre dans mes autres parcelles, n'ayant donc pas subi ce surpâturage chronique. J'ai bon espoir que la patience, additionné à de bonnes pratiques, aura raison de ma détermination.

A vous de jouer ! 

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